Entre deux étapes de ma formation, j'ai pu passer un week-end bien mérité à Marseille. Et quel week-end puisqu'il m'a permis de réaliser une vraie soupe de poissons en présence d'une cuisinière émérite du cru ! Un privilège rare et au final, une envie évidente : partager cette recette avec vous...
Avant toute chose, la matière première : de splendides poissons de roche (grondins, vives, rougets entre autres) achetés le matin même sur le vieux port. D'une fraîcheur incroyable, car achetés vivants (1er secret de la recette !).
La suite des ingrédients de base : des cébettes, une grosse pomme de terre, du concentré de tomate (les 3/4 d'une petite boîte), quelques brins de fenouil séché, un bouquet garni, deux gousses d'ail et du safran.
Jusqu'ici, rien de bien compliqué. Enfin lorsqu'on se trouve à Marseille, car le fenouil séché n'est tout de même pas l'ingrédient le plus répandu au nord de la Loire !
Un conseil à l'achat du poisson. Pensez à le faire vider par votre poissonnier, pas comme votre serviteur qui a donc eu la joie de vider tous ces beaux poissons. Une expérience nouvelle certes mais dont on peut se passer aisément...
Les poissons une fois vidés, donc, tout ce beau monde se retrouve dans une grande casserole avec de l'eau à couvert ainsi que les cébettes, le fenouil séché, le concentré de tomate, le bouquet garni, sel, poivre ainsi qu'une pointe de couteau de safran.
C'est parti pour une cuisson lente à feu doux, pendant une bonne heure et demie. L'idée principale est d'obtenir un bouillon qui ne soit pas trop fluide sans pour autant être trop épais (magie de la cuisine oblige !), sachant que la chair des poissons viendra densifier le jus au final.
Et là commencent les difficultés si, comme moi, vous n'êtes pas équipés d'un moulin à légumes. Car une fois les chairs sorties du bouillon, il est temps d'en extraire la substantifique moelle. Et autant vous dire qu'un pilon et une passoire ne font absolument pas l'affaire. C'est donc armé d'un filet de lavage pour le linge (véridique !) et de gants très épais que j'ai broyé toute cette matière. Séance de torture s'il en est compte tenu des innombrables arrêtes qui semblaient prendre un malin plaisir à se planter dans ma peau...
Enfin, le plus important est d'y être parvenu ! Et voici donc le résultat. Tous les sucs extraits des chairs sont tamisés afin de s'assurer qu'aucune arrête ne parviendra à s'immiscer dans la soupe. Ne reste plus alors qu'un amas très sec de chairs et d'arrêtes. Impossible à réutiliser - direction poubelle.
En fonction de sa consistance, le bouillon peut alors éventuellement être mis sur le feu afin d'obtenir davantage de concentration.
Pas d’œuf à l'horizon pour l'aïoli. La pomme de terre cuite dans le bouillon constitue la base de la préparation. Quelques gouttes de soupe permettent de délier l'ensemble avant de le monter à l'huile d'olive comme une mayonnaise. Le tout se fait au pilon dans un geste circulaire régulier.
Sans surprise, le goût inimitable de l'aïoli vient de la quantité généreuse d'ail qu'il faut incorporer. A cet effet, le plus simple est d'utiliser un gratte ail. Eh oui, l'élaboration de la soupe de poissons nécessite un équipement de pointe...
Ne reste plus qu'à intégrer une pointe de couteau de safran afin que celui-ci ne prenne pas le dessus.
De la sueur et une crampe au poignet plus tard, voici le véritable aïoli terminé. Une texture onctueuse, pas trop grasse et un goût d'ail bien équilibré. Le safran apporte de la complexité. Le plus dur est désormais de patienter et de réserver l'aïoli aux croûtons dans la soupe. Peut-être la partie la plus dure de la recette... quand on est gourmand.
Car il est inutile de le préciser. Sans croûton, la soupe de poissons n'existe pas. Ils permettent d'apporter de la matière à la soupe et de la relever encore davantage grâce aux aulx que l'on aura préalablement frottés dessus.
Tout est désormais prêt. Ne reste plus qu'à sortir un joli plat provençal et d'ouvrir une belle bouteille de vin blanc. Le sancerre "les caillottes 2011" de chez Pascal Jolivet ouvert ce jour-là faisait parfaitement l'affaire.
Ça y est. Les croûtons bien garnis d'aïoli flottent fièrement... Le graal est à portée de cuillère. On ferme les yeux, on se penche sur l'assiette, on respire les délicieuses effluves safranées. Et le bonheur à la première bouchée tant les parfums durent en bouche. Concentration et intensité. Un délice jusqu'à la dernière lampée.
Le plus beau compliment pour une marseillaise c'est de retrouver cette expérience sur ce blog dédié aux voyages de notre auteur autour du vin. Les senteurs imaginées de poisson et de safran donnent littéralement l'eau à la bouche, particulièrement à l'heure du déjeuner.
RépondreSupprimerMa foi, à lire cette recette, on aurait presque envie de se lancer dans la cuisine méridionale... mais sachons refréner notre envie et laisser à ceux qui sont devenus des professionnels de la soupe de poissons le plaisir de la réaliser un de ces jours...
RépondreSupprimerNe me reste,donc plus qu'à refaire cette soupe et de réunir autour de la table parisiens et marseillais ! Un beau défi mais je crois au pouvoir rassembleur de la bonne chère !
RépondreSupprimerJe veux un gratte-ail pour Noël, c'est trop classe !!!!
RépondreSupprimerMais dis-moi, je ne reconnais pas tes mains sur la photo, j'ai bien l'impression que tu as été épaulé...